La salle immersive du Centre de formation professionnelle des Riverains.

Le service national du RÉCIT en formation professionnelle est fier de vous partager cet article publié par L’École branchée écrit par Éric Thibault

Ce texte est le résumé d’une entrevue réalisée au Centre de formation professionnelle des Riverains auprès de Johanne Prud’homme, directrice et de Jonathan Perron-Miville, conseiller pédagogique, le 28 avril 2022.

Ce n’est pas un secret, le monde de l’enseignement en formation professionnelle est condamné à innover perpétuellement. Le marché du travail évolue et la clientèle aussi. Ainsi, il est nécessaire d’adapter nos façons pour faire acquérir des connaissances, des habiletés et des compétences.

L’expérience vécue par l’apprenant est au cœur de la rétention des savoirs et augmente ou diminue la motivation de celui-ci. Ainsi, lorsque disponible, une expérience immersive est indubitablement une plus-value lors de l’enseignement de certaines compétences.

Les activités pédagogiques immersives, ce n’est plus le futur, c’est maintenant.

Aujourd’hui, nous nous intéresserons à une innovation complètement folle qui a passé un peu inaperçue dû à la pandémie de COVID, je parle de la salle immersive du Centre de formation professionnelle des Riverains à Repentigny.

 Tout d’abord, la salle immersive est composée de bancs de différentes hauteurs, d’un lutrin et de toiles recouvrant l’ensemble des murs. Afin de projeter une image à 360 degrés, 14 projecteurs HD et un ensemble de 5 haut-parleurs haut de gamme y sont installés. La projection est assurée par le logiciel, Caneva, développé par la compagnie Immersive. Ce logiciel s’assure que la projection ne déborde pas de son cadre et que l’image reste uniforme. Le rendu est tout simplement parfait, on ne voit aucune bordure et même dans les coins de la salle, la projection est impressionnante. Lorsque plusieurs vidéos différentes sont diffusées simultanément, aucune bordure n’est visible. Le logiciel rend l’expérience très fluide et permet aux apprenants une expérience très convaincante.

Par ailleurs, la salle peut projeter des films, des vidéos, des animations des documents PowerPoint, et des photos. Ce sont surtout ces dernières qui sont utilisées, car un des objectifs de la salle immersive est de développer la collaboration et la communication, donc, un environnement statique est de mise.

Ainsi, cette salle permet aux enseignants d’appliquer des stratégies de pédagogie active (Desjardins, Sénécal[1]). Les stratégies liées à la pédagogie active sont celles qui permettent de placer les apprenants dans un rôle actif, comme le jeu de rôle, la résolution de problèmes et des débats. La pédagogie active vient soutenir le développement de la créativité, la collaboration et la résolution de problème concret. Il est permis de croire que la collaboration permet de réduire l’anxiété des étudiants face aux apprentissages à réaliser. Celle-ci permet aussi de développer une attitude positive envers les enseignants, amenant ceux-ci à devenir des facilitateurs dans ce contexte.

Du côté technique, ce n’est pas une photo panoramique captée par un appareil photo ordinaire qui peut être utilisée, mais plutôt un ensemble de photos collées et assemblées. L’exercice demande de prendre une photo à tous les 5 degrés afin d’avoir un rendu parfait. Pour ce qui est de la résolution, on ne rigole pas. Le monstre projette à l’horizontale 15 360 pixels sur 770 pixels en hauteur, c’est imposant. Ainsi, un appareil photo de 360 degrés 4K ne suffit pas pour exploiter cet environnement. Si on désire utiliser un seul appareil photo 360, ça demande une bête.

La naissance d’un géant.

Il y a trois ans madame Johanne Prud’homme, directrice du Centre de formation professionnelle, estimait que même si le centre qu’elle dirige est connu et reconnu dans la région, le moment était venu pour un nouveau défi et le « momentum » était présent pour innover. Les étudiants avaient besoin de nouveaux challenges et les enseignants devaient avoir l’opportunité d’être innovants. Ainsi, elle a confié un très gros mandat à Jonathan Perron-Miville, conseiller pédagogique, celui d’explorer les nouvelles tendances de la technopédagogie et de revenir lui présenter une option innovante, très innovante. Cependant, il n’était pas question d’avoir simplement du tape-à-l’œil. La solution devait avoir un impact sur la rétention des savoirs et l’attraction des élèves. Cet environnement devait servir aux étudiants, mais également aux enseignants. De plus, cet environnement devait rapprocher les élèves le plus possible de la tâche, du milieu de travail. Bien entendu, le milieu de stage est l’endroit où l’étudiant peut vraiment mettre en application les savoirs acquis. Cependant, peut-on simuler ce genre d’environnement? Peut-on avoir un environnement qui nous permet de simuler des visites de milieux de travail? Car, bien que la visite de milieux de travail soit bénéfique pour l’apprenant, cela comporte son lot de désavantages; de l’organisation, du temps, des coûts et des assurances.

Évidemment, l’idée des casques de réalité virtuelle est apparue d’elle-même pour le conseiller pédagogique. Celui-ci, bien qu’intéressant, trouve rapidement ses limites dans l’individualisation de l’expérience. L’expérience recherchée se devait d’être vécue en groupe. Un des éléments importants qui a été pris en compte lors du choix de la technologie, ce sont les programmes enseignés au Centre de formation. Ce sont principalement des programmes qui sont en lien avec le service à la clientèle. Ainsi, ce sont surtout les savoir-être et le non verbal des apprenants que l’on désire travailler avec ce nouvel environnement, donc les casques de réalité virtuelle et de réalité augmentée n’ont pas été retenus, car l’expérience vécue est trop individuelle.

Ainsi, le conseiller pédagogique a développé le concept, totalement unique et encore jamais implanté au Québec, de la salle immersive et a réussi à convaincre la direction. Les avantages sont nombreux : l’élève est complètement immergé dans la tâche et l’enseignant reste au cœur de son activité, il la dirige selon son intention pédagogique et peut adapter ses interventions selon sa clientèle. De plus, selon madame Prud’homme, le fait que la clientèle du centre soit majoritairement masculine, l’environnement choisi se devait d’être participatif, flexible et différent de l’enseignement traditionnel.

Une idée aussi innovante a un coût et celui-ci est assez élevé. Ainsi, madame Prud’homme avec l’appui du Centre de services scolaire a dû planifier ses priorités et s’assurer d’avoir une saine gestion pour financer ce projet innovateur.

Un atout que le Centre de formation avait pour permettre l’implantation de ce projet est que la formation de soutien informatique y est enseignée. Ainsi, le Centre était déjà équipé d’installations informatiques puissantes et d’une salle de serveurs pouvant soutenir les besoins informatiques de la salle immersive.

Bien que cette salle soit technologiquement très innovante, l’utilisation est très simple pour l’enseignant ou la psychoéducatrice. Les activités sont accessibles sur une tablette et l’utilisateur n’a qu’à cliquer sur l’activité choisie et elle apparaît instantanément sur le mur. L’utilisateur choisit le scénario sur la tablette et hop, le scénario s’affiche instantanément. Il peut changer de scénario du bout des doigts d’un environnement à un autre en un claquement de doigts.

La conception d’activités demande un peu de préparation. L’enseignant se doit de trouver l’endroit où les photos devront être prises, obtenir les autorisations nécessaires, et ensuite le technicien en audiovisuel se déplace et va prendre les clichés pour pouvoir faire le montage et préparer l’activité.

Pendant l’heure du dîner, la salle est accessible aux étudiants et au personnel afin qu’ils puissent s’y détendre. En effet, de la musique douce y est diffusée et des images apaisantes y sont projetées afin de créer un environnement qui permet la relaxation et la détente. L’activité du dîner est chapeautée par la psychoéducatrice, cela lui permet d’avoir un contact étroit avec la clientèle plus anxieuse.

 La salle immersive a un coût certes, cependant, l’endroit permet des activités pédagogiques immersives axées sur la pédagogie active qui permettent à l’enseignant d’être un facilitateur et de travailler les savoirs, ainsi que les savoir-être. De plus, cette salle permet de simuler des endroits difficiles d’accès et ainsi de permettre aux apprenants d’avoir une expérience immersive exclusive. Ainsi, dans un monde en perpétuel changement, la salle immersive est un outil puissant permettant de rejoindre les nouveaux apprenants déjà habitué aux nouvelles technologies. Il ne reste qu’à espérer que cette innovation puisse faire son chemin dans les centres de formation de la province.

[1] DESJARDINS, J.& SÉNÉCAL, I. (2016) La pédagogie active,
https://www.profweb.ca/publications/dossiers/la-pedagogie-active, consulté le 18 mai 2022

Cet article a été écrit par:
Éric Thibault